Lors du dernier Conseil municipal, la Ville de Grenoble a adopté un voeu pour un moratoire sur l’installation d’antennes 5G, qui a été adressé au Premier ministre Jean Castex, à la Ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et au Ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran.
Le défi des politiques publiques du 21ème siècle consiste à agir en ayant conscience des limites physiques planétaires, de multiples exemples nous imposent cette urgence : le jour du dépassement, budget carbone, tarissement des énergies fossile et des matériaux… Et tant d’autres encore.
Nous réaffirmons notre engagement à respecter le cadre des accords de Paris pour rester sous un réchauffement de 1,5°C à 2°C, ce qui impose de réduire drastiquement nos consommations énergétiques et émissions de gaz à effet de serre (GES).
Selon le Shift Project, la croissance de la demande énergétique du numérique est insoutenable à +9 % par an, dans un contexte de développement poussé par « l’économie de l’attention ».
Les choix techniques concernant l’investissement lourd dans de nouvelles infrastructures doivent être examinés, débattus, évalués en arbitrant à propos de l’apport effectif relativement à l’impact social, environnemental et sur la santé.
Concernant le déploiement de la 5G, le rapport final de la Convention Citoyenne pour le Climat –Les propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat, Octobre 2020 – estime que : le « passage de la 4G vers la 5G générerait plus de 30 % de consommation d’énergie carbonée en plu », et que « l’innovation doit être vertueuse pour sortir du carbone ».
Dans ses propositions pour réduire les impacts environnementaux du numérique la convention indique que : « Dans une logique d’écoconception des services, nous proposons d’évaluer les avantages et les inconvénients de la 5G par rapport à la fibre avant et non après avoir accordé les licences pour son développement mais aussi d’initier/conseiller à l’utilisation de la solution la moins impactante pour l’environnement. Instaurer un moratoire sur la mise en place de la 5G en attendant les résultats de l’évaluation de la 5G sur la santé et le climat. »
Il convient ici de rappeler que procéder aux enchères des fréquences 5G est une violation de l’engagement pris par le Président le 29 juin 2020 concernant la reprise des propositions des 150. Il avait alors en effet déclaré qu’il ne s’engageait pas sur 3 des 150 engagements de la Convention citoyenne. Le moratoire sur la 5G était donc acquis.
Sur l’enjeu environnemental et énergétique, nous soulignons aussi l’obsolescence du matériel informatique et des objets connectés. La 5G implique un renouvellement complet de l’intégralité des smartphones de la planète, et prévoit la création de plusieurs milliards de nouveaux objets connecté dans le domaine du téléphone, de l’électroménager, de l’industrie, des transports par exemple.
Les conséquences sur l’environnement et sur le pouvoir d’achat des ménages sont désastreuses.
La convention citoyenne met aussi en avant le sujet de l’évaluation du passage à la 5G sur la santé humaine.
Sur ce point, l’Anses (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire), qui a été saisie afin de conduire une expertise sur l’exposition de la population aux champs électromagnétiques de la 5G et sur les éventuels effets sanitaires, n’a pas pu conclure sur l’impact et les risques sanitaires liés au déploiement de la nouvelle infrastructure d’antennes relais 5G.
Dans son rapport préliminaire de janvier 2020, l’Agence a identifié deux champs d’évaluation des risques distincts correspondant aux deux nouvelles bandes de fréquences 5G, autour de 3,5 GHz et de 26 GHz dont les modalités d’exposition sont différentes. Elle a notamment mis en évidence un « manque de données scientifiques sur les effets biologiques et sanitaires potentiels liés à l’exposition aux fréquences autour de 3,5 GHz ». Elle propose « d’extrapoler les résultats des travaux d’expertises antérieurs de l’Agence sur les impacts sanitaires » des fréquences proches.
De nombreuses personnes déclarent en outre être affectées par les champs électromagnétiques, y compris sur la commune de Grenoble, notamment concernant un site dont le champ dépasse 12V/m (très au-delà du niveau des points atypiques à 6V/m selon l’ANFR, ces points atypiques sont les lieux où le niveau d’exposition du public aux champs électromagnétiques dépasse substantiellement celui généralement observé à l’échelle nationales, selon l’article 1 de la loi « Abeille » n° 2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques).
Les symptômes sont reconnus comme réels par l’OMS depuis le Colloque de Prague (25-27 Oct. 2004) sur l’Electro-Hypersensibilité (EHS) ou Hypersensibilité Électromagnétique.
Il est donc, ici aussi, urgent d’attendre les conclusions des scientifiques avant de déployer une telle infrastructure d’antennes 5G.
Nous ne sommes ni technophobes, ni dogmatiques. La technologie fait partie de nos vies, de notre société, nous pensons à cet égard que c’est un sujet politique et comme tout sujet politique, il doit être débattu et partagé.
Et non imposé.
Après en avoir délibéré, le Conseil municipal décide :
- de formuler la demande au 1er ministre Jean Castex, à la Ministre de la Transition écologique Barbara Pompili et au Ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran, de fixer un cadre protecteur concernant le déploiement de nouvelles antennes de téléphonie mobile, en matière de climat (énergie consommée, déchets générés) et de santé publique (niveau d’exposition aux ondes électromagnétiques, déconnexion des publics fragiles et des enfants) et tout particulièrement de :
- réduire les limites réglementaires de champs électromagnétiques autorisés de 61V/m à 6V/m selon le niveau des points atypiques observés par l’ANFR
- réduire l’exposition du public en demandant aux opérateurs l’extinction des réseaux d’ancienne génération de téléphonie 2G, GSM, GPRS et EDGE.
- respecter les préconisations de la Convention citoyenne et d’instaurer un moratoire sur l’installation d’antennes 5G sur le territoire national en attendant les résultats de l’évaluation des conséquences sanitaires et le climat du déploiement de cette technologie. Cette évaluation devra être nourrie par une évaluation des avantages/inconvénients liée au déploiement de la 5G qui inclut le rapport définitif de l’ANSES à propos des effets sanitaires.
- saisir la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) afin d’organiser un débat national sur le projet de déploiement de l’infrastructure pour les réseaux 5G, le coût de ce déploiement étant supérieur à 300M€.
Durant cette attente, la Ville de Grenoble continuera de rejeter toutes les demandes ou autorisations de travaux liées à la 5G, conformément aux conclusions de la Convention citoyenne sur le climat.