En 2023, Grenoble votait la mise en place d’un bouclier social et climatique pour les habitant-es avec des mesures ambitieuses pour l’alimentation (2 millions € par an), parmi lesquelles le soutien à une initiative locale de Sécurité sociale de l’alimentation.
L’alimentation au coeur des débats nationaux
Le système agricole et alimentaire actuel est dysfonctionnel, il ne parvient pas à assurer une alimentation adéquate en termes de quantité et de qualité pour l’ensemble de la population. Il engendre l’appauvrissement des travailleuses et travailleurs impliqués dans la production et la transformation des produits agricoles, dans la distribution des denrées alimentaires, tout en épuisant les ressources naturelles et les écosystèmes essentiels à notre survie. Le mouvement de colère des agricultrices et agriculteurs de janvier 2024 est le symptôme d’un système moribond en marche forcée vers plus d’inégalités et d’exploitation. Selon l’enquête du CRÉDOC de novembre 2022, 16 % des Français déclarent ne pas manger à leur faim. Parallèlement, dans le secteur agricole, plus de 20 % des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté, avec 11 000 exploitants percevant le RSA, et les éleveurs bovins touchent en moyenne 11 340 euros par an (Reporterre).
Innovation sociale à Grenoble : une initiative locale de Sécurité sociale de l’alimentation
Face aux inégalités d’accès à une alimentation saine, durable et choisie, Grenoble soutient les réponses alliant justice sociale, démocratie et respect du vivant. En 2023, la municipalité de Grenoble prenait la décision de mettre en place le bouclier social et climatique, adressant les principaux postes de dépenses des ménages : logement, mobilités, alimentation, santé. Parmi les mesures du pilier “Alimentation” du bouclier figurent la baisse des prix des repas scolaires ainsi que le soutien à une initiative locale de la Sécurité sociale de l’alimentation (SSA). Entre mars et novembre 2023, la municipalité a organisé les échanges avec les parties déjà engagées dans le domaine de la solidarité et/ou de l’alimentation, sous une forme ou une autre. Ces réunions ont réuni des représentant-es de coopératives, de syndicats, d’acteurs de la production et de la distribution, ainsi que de la sphère citoyenne et associative impliqué-es dans la transition alimentaire. En novembre 2023, une gouvernance transitoire a émergé, l’intention de mettre en place une caisse de cotisation alimentaire grenobloise s’est précisée.
Mettre l’alimentation en sécurité et en débat démocratique
En lien avec le Collectif national pour la Sécurité sociale de l’alimentation constitué depuis 2019, Grenoble revendique la mise en œuvre d’un droit tangible à une alimentation digne et choisie pour toutes et tous, issue de modes production durables pour l’environnement et le vivant, justement rémunératrice pour les productrices et les producteurs.
Le terme « Sécurité sociale » est utilisé car le mécanisme s’inspire fortement du système de santé voulu par le Conseil National de la Résistance, mis en place entre 1945 et 1967, où chaque individu-e cotise en fonction de ses moyens dans une caisse dédiée. Dans la SSA, en échange de cette cotisation, chaque cotisant-e recevra une somme forfaitaire qui permettra l’achat de denrées alimentaires dans un réseau de magasins conventionnés, à terme sélectionnés démocratiquement par les cotisant-es même.
Dans un travail partenarial avec l’ensemble des acteurs de l’alimentation et de la solidarité de notre ville, la municipalité soutient l’initiative locale de la SSA avec un budget dédié de 1,4 million d’euros par an. Cette démarche s’inscrit dans la stratégie alimentaire de la Ville, votée en Conseil municipal en septembre 2023.
Déploiement du dispositif en 2024
En vue de la mise en place opérationnelle de l’initiative locale de Sécurité sociale de l’alimentation en 2024, la municipalité prévoit de consolider les acteur-rices impliqués dans cette initiative. Dès l’automne la caisse alimentaire commencera à opérer. Plusieurs assemblées citoyennes de l’alimentation émergeront comme espaces de partage des habitant-es sur leurs vécus alimentaires, leurs besoins et leurs cultures, leurs difficultés d’accès comme leurs désirs de mise en commun. Ces assemblées auront également vocation à délibérer sur le conventionnement du réseau de distribution.
Un des critères de réussite de cette initiative locale est son caractère éminemment partenarial : la municipalité se mobilise aux côtés de la société civile dans cette innovation sociale de mise en sécurité de notre alimentation, en veillant à associer toutes les parties prenantes et les forces vives de notre ville.