Le 31 janvier, les maires de plusieurs grandes villes dont Grenoble ont adressé une lettre au Premier Ministre Gabriel Attal pour s’opposer aux projets de révision de la Loi SRU. Mais de quoi il s’agit exactement ?
La loi SRU : un dispositif de mixité sociale
En l’état actuel des choses, selon la loi SRU, les communes comptant plus de 3 500 habitants (ou 1 500 dans la région parisienne) doivent atteindre, d’ici 2025, un pourcentage compris entre 20% et 25% de logements sociaux au sein de leur parc résidentiel principal. Les municipalités ne respectant pas ces critères se voient imposer des objectifs de construction sur trois ans ainsi que des amendes visant à soutenir le logement social. Cette loi soutient depuis 2000 la politique menée en matière de logement et de mixité sociale dans les aires urbaines.
Dans un contexte de crise du logement sans précédent
Le contexte national connaît une crise majeure du logement depuis 15 ans. La crise est si profonde et les réponses politiques si insuffisantes que l’ONU considère en 2019 la France « coupable de violations du droit au logement ». En 2023, 300 000 logements ont été construits, c’est le chiffre le plus bas depuis 1996. Alors que la France compte 4 millions de personnes mal logées, 2,6 millions de demandeurs d’un logement social et 3000 enfants à la rue, la hausse des prix du foncier rend la production de logements sociaux de plus en plus difficile.
Une modification du calcul du taux SRU dangereuse pour le logement social
Dans ce contexte, alors que la production de logements sociaux devrait être au cœur des objectifs de la politique menée en la matière, le Gouvernement annonce revoir les obligations de logement social à la baisse. Cela passe par la modification du calcul du taux SRU, en y incluant les logements intermédiaires, et donc mécaniquement la réduction du niveau à atteindre en pourcentage de logement social pour les villes. Le logement locatif intermédiaire (LLI) reste inaccessible pour les ménages les plus précaires. Seulement 3% des ménages en attente d’un logement social seraient éligibles aux logements intermédiaires en raison de leurs revenus. Un telle révision à la baisse des engagements de l’Etat en matière de production de logements sociaux et de mixité sociale serait nécessairement synonyme d’aggravation de la situation des ménages précaires et des classes moyennes inférieures.
Grenoble s’oppose aux nouvelles mesures du Gouvernement
Grenoble s’oppose aux nouvelles mesures du Gouvernement, en particulier à la modification du calcul du taux SRU, car elles risquent de compromettre nos efforts locaux en faveur de la mixité sociale et du logement abordable. Grenoble est presque parvenu, depuis 2014, à atteindre le taux de 25% de logement social (24,66% en 2023) sur le périmètre de la commune. La ville s’était fixé l’objectif symbolique préconisé en la matière à partir du taux SRU tel que calculé jusqu’ici. Or, la modification du calcul du taux induit nécessairement sur l’ensemble du territoire une révision à la baisse des objectifs effectifs que se fixent les collectivités. Grenoble est attachée à une politique du logement qui favorise la mixité sociale, garantisse l’accès au logement digne, et réponde aux besoins spécifiques de ses habitant-es. Si d’autres villes ont jusqu’ici été contraintes à produire du logement social, rien ne les y oblige plus dès lors que les prérogatives de la loi SRU seront dévoyées.