L’État a la charge d’assurer à toute personne sans-abri et en situation de détresse médicale, psychique ou sociale un hébergement d’urgence, à savoir une solution de relogement temporaire. Or, force est de constater que cette compétence n’est pas assumée. En parallèle, le nombre de personnes à la rue en France continue d’augmenter d’après le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre.
Un constat national et local toujours plus alarmant
Le droit à un hébergement d’urgence est un droit inconditionnel réaffirmé par le Conseil Constitutionnel le 25 janvier 2024. Toutefois, dans les faits, il n’est pas appliqué par l’État. En effet, le nombre de personnes sans abris ne cesse d’augmenter. Cette réalité indigne de notre nation des droits humains préoccupe de plus en plus. Malgré les efforts qu’elles portent, les collectivités territoriales ne peuvent se substituer à l’action de l’État, qui détient la compétence en matière d’hébergement, mais dont les ambitions, la volonté et les moyens financiers alloués s’avèrent largement insuffisants. La fin des plans “Grand Froid” et les remises à la rue ajoutent encore des difficultés à une situation déjà inacceptable : multiplication des campements et squats, présence de milliers d’enfants et de personnes gravement malades à la rue, lassitude des acteurs et actrices de terrain, etc.
Grenoble agit déjà, bien au-delà de ses compétences
Face à ce manque d’ambition et d’action de l’État, Grenoble a décidé, dès 2014, d’agir au-delà du cadre de ses compétences. Ainsi, elle a créé le centre d’hébergement du Rondeau, a mis à disposition des anciens appartements d’instituteur-rices, des places au sein des lieux d’urbanisme transitoire (Abbaye), et travaille avec l’association “un toit pour tous” pour loger les personnes dans le diffus. Elle a également conventionné avec des collectifs pour accueillir des personnes avec besoins spécifiques (comme “Toustes pour un toit” pour les personnes en transition de genre). La Ville a également fait le choix d’accompagner l’occupation des écoles pour permettre aux familles avec enfants de ne pas être à la rue. En tout, ce sont 241 places mises à disposition (pour un budget annuel estimé à deux millions d’euros pour la Ville), avec 100 places supplémentaires prévues cette année dans le cadre du bouclier social et climatique, ce qui amènera à 341 places mises à disposition par la Ville fin 2024.
En parallèle, Grenoble continue d’interpeller l’État, en lien avec d’autres villes, des associations de droit au logement et des collectifs. La Ville a également fait des propositions de bâtiments vacants que l’État pourrait réquisitionner pour augmenter sa part d’hébergement d’urgence.
L’ultimatum de Grenoble, Strasbourg, Bordeaux, Lyon et Rennes
En octobre 2023, Grenoble avait déjà uni ses forces avec d’autres collectivités pour enjoindre l’État à prendre ses responsabilités et à rembourser une partie de la facture engagée par la Ville pour son compte. Face au silence en guise de réponse, les Villes de Strasbourg, Bordeaux, Grenoble, Lyon et Rennes déposent à nouveau des recours indemnitaires contentieux contre l’État auprès de leurs tribunaux administratifs respectifs. Dans un courrier au Président de la République, les maires concerné-es demandent à l’État le respect de son engagement concernant une enveloppe de 120 millions d’euros supplémentaires pour l’hébergement d’urgence. Ils et elles demandent par ailleurs à l’État de se coordonner avec les collectivités locales et les acteurs et actrices de terrain.
Ils et elles tendent la main au Président pour refonder un système doté de moyens adéquats, juste et efficace, en lien avec les collectivités et les acteurs et actrices de terrain. La volonté est de travailler ensemble à un meilleur accès aux droits pour toutes et tous, pour que chacun-e puisse vivre dignement.